RETOUR SUR LA MARCHE DES SANS PAPIERS À PARIS LES 16 ET 17 OCTOBRE 2020

Si la COVID 19 a occupé beaucoup de place ces derniers mois, cela n'a pas empêché la marche des sans papiers d'avoir lieu entre le 18 septembre et le 17 octobre. Retour sur les 16 et 17 octobre, jours de son arrivée à Vincennes et de son défilé à Paris.

 

 

Devant le CRA de Vincennes…


Les marches des sans papiers sont parties des quatre coins de la France le 18 septembre : sud, est, ouest, sud ouest, nord. Elles ont, pendant un mois, convergé vers Paris, accueillies en route par des municipalités, des associations, des citoyens. Leur message est clair : régularisation des sans papiers, fermeture des centres de rétention et un logement pour toutes et tous.
En route, les différentes marches n’ont pas manqué d’aller manifester devant les CRA et il en a été de même en région parisienne, avec un passage devant le LRA (lieu de rétention administrative) de Choisy et une marche vers le CRA de Vincennes, organisée par la coordination des sans papiers de Montreuil, soutenue par la Fasti, la Cimade, À bas les CRA.

Le 16/10, Nous nous sommes donc retrouvés devant la gare de RER de Joinville le Pont, où ont eu lieu les premières prises de parole ; le discours est simple et direct :


« Nous sommes en France, nous voulons construire notre avenir en France, nous aimons ce pays, nous voulons simplement l’égalité des droits avec tous ses habitants. »

Ce sont les sans papiers qui s’expriment ici, avec une force et une sérénité qui suscitent l’admiration. Ils insistent sur l’injustice d’un enfermement quasi carcéral de personnes n’ayant commis aucun délit.
Fort d’une centaine de manifestants, notre cortège s’ébranle et se heurte très vite (rue de la Pyramide)… à un impressionnant dispositif policier, qui bloque les accès au CRA par le bois de Vincennes. Nous allons donc passer par la route de Gravelle, qui longe, mais d’assez loin, le CRA. Le dispositif policier y est massif : voitures de police et policiers à pied disposés tout au long des fortifications qui entourent l’ancienne redoute de Gravelle. Nous entendons aussi des aboiements : les policiers sont-ils accompagnés de chiens, ou bien s’agit-il simplement des chiens de l’unité cynophile, installée à côté du CRA ? 


Bref, tout ce dispositif  fait que c’est quasiment impossible de s’approcher. Nous décidons donc de nous faire entendre. La sono des sans papiers de Montreuil est très efficace et de toutes nos forces nous crions nous aussi, que nous sommes là.


Il faut savoir que suite à l’épidémie de Covid, les CRA 2A et 2B sont réservés aux retenus en attente du résultat du test et aux personnes malades, assez peu nombreux. Les autres retenus sont rassemblés dans le CRA 1, donc loin de la route de Gravelle où nous nous trouvons. Nous crions, nous attendons, aux aguets. Avec beaucoup d’émotion, nous entendons enfin des cris, une clameur assez lointaine, mais bien audible ! Nous redoublons de cris puis décidons d’utiliser des moyens de télécommunication plus précis : nous appelons au téléphone les camarades enfermés, que nous entendons très bien !
Nous n’irons pas plus loin : la route est barrée par les voitures de police.
Après quelques cris collectifs "LIBERTÉ ! LIBERTÉ ! LIBERTÉ !", des prises de paroles bien inspirées, de sans papiers, de militants anticolonialistes, de soutiens et un traditionnel "police partout justice nulle part" malheureusement tout à fait à propos, nous avons rebroussé chemin, à l'heure prévue. Les policiers nous encadraient toujours de manière très resserrée, y compris dans la portion de bois qui nous séparait des barbelés du CRA.


Petit rebondissement final : nous avons bloqué une intersection quelques dizaines de minutes car 2 camarades qui tentaient de nous rejoindre pour manifester avaient été arrêtés par la police. 2 bruits différents parcouraient notre groupe : 1 gradé niait cette information et d'autres agents nous indiquaient qu'il seraient libérés à 19h...
Je n'ai pas la fin du rebondissement car j'ai du partir mais je suis certaine que 2 camarades avaient effectivement été stoppés ; je n'ai pas l'heure de leur libération.

Nous nous retrouverons le lendemain, place de la République à Paris, avec l’ensemble des marcheurs et de leurs soutiens !


Place de la République

Certains marcheurs et soutiens (LDH, Solidarité Wilson, RESF, Droits Devants,... et bien d'autres) arrivent sur la place de la République à 14h après être entrés dans Paris par ses portes : Porte de la Chapelle, Porte de Vincennes, Porte d'Italie.
 

 




Les cortèges sont accompagnés par des FDO qui les encadrent devant et derrière, parfois aussi sur les côtés. Certains témoignent qu'elles ont souhaité connaître les noms des occupants d'un bus venus de province à la marche !


À 14h, heure du rendez-vous, il n’y a pas grand monde, si bien que le cortège qui se forme part rapidement par le bd de Magenta, ce qui est plutôt mauvais signe. La délégation de la Cimade, assez fournie, passe avec ses drapeaux, nous  décidons de la suivre : nous travaillons tellement ensemble et sur les mêmes bases, que nous pouvons défiler ensemble.
Les FDO accompagnent ce nouveau cortège. En ligne sur la place au niveau du café Fluctuat Nec Mergitur les derniers manifestants sont invités à rejoindre le cortège Bd Magenta.
Au fur et à mesure que le cortège avance, nous nous apercevons que le rassemblement grandit :
Nous discutons avec des copains encore inconnus venus de toute la France :  - Bonjour à Josette de la section LDH d'Annecy ! Nous croisons nos copains de la CGT de Marseille, de la LDH de Dijon et bien d'autres encore.


C’est de plus un bonheur d’avoir avec nous des groupes qui font de la musique en direct et non via des hauts parleurs accrochés à des camionnettes : percussionnistes en blanc, énormes cuivres rythment la marche.


Les forces de l’ordre sont certes importantes, mais peu visibles sur le trajet lui-même. Lorsque nous bifurquons rue La Fayette, ce sont les camionnettes des organisateurs qui bloquent le bd Magenta pour nous faire obliquer à gauche.
Nous arrivons place Étienne d'Orves à la Trinité. Bien loin de la destination finale voulue par la marche :

 




Nous constatons que la place est encerclée par des FDO, un passage est laissé ouvert rue Blanche et rue Saint Lazare. 


Nous apercevons des Drones dans le ciel qui surplombent la place Estienne d'Orves. Nous entendons, un petit quart d'heure avant 18h dans un haut parleur, un policier demandant aux manifestants de rejoindre les trottoirs car la circulation va être rétablie. Un ratissage de la place a lieu, un heurt entre des manifestants et des FDO se produit sur le trottoir central. La place est évacuée par les FDO.


Nous repartons vers la rue Blanche. Nous nous posons dans un café avant l'arrivée du couvre feu. Nous n’avons pu trouver aucun décompte dans la presse, mais devions être au moins 10 000 (15 000, avancent certains).

(Merci à Sylvie et à Hortense pour leur relecture et leurs apports !)